28 juin condamnation à mort et 06 juillet 1962 : Assassinat d’un officier français.
A Paris, les différents procès des responsables OAS tournent à la déconfiture du général De Gaulle. Il n’obtient pas la tête des généraux qui ont osé le braver, il devra se contenter du sang des légionnaires Albert Dovecar et Roger Degueldre, fusillés respectivement les 7 juin et 6 juillet 1962, d’un civil, Claude Piegts et de l’ingénieur chef Bastien-Thiry, qui n’avait pas une goutte de sang sur ses mains, dont il refusera les grâces et qu’il fera exécuter sans aucune pitié.
Ce mot n’existait pas dans le vocabulaire de de Gaulle.
Il n’émettra même pas une parole de regret en apprenant le suicide de son ami le général de Larminat, compagnon de la libération et grand chancelier de l’Ordre.
Le général de Larminat devait présider le tribunal de la cour martiale de justice (qui sur ordre de de Gaulle avait remplacé le Haut tribunal militaire jugé trop clément envers les « factieux »). Il s’agit là d’une juridiction d’exception totalement contraire au droit français car elle permet de juger sans aucune voie de recours.
Le général de Larminat se fait hospitaliser au Val de Grâce afin d’échapper, sous le prétexte d’un ennui de santé, à cette présidence qu’on lui impose. Sa chambre est voisine de celle du général Ginestet, qui vient d’être grièvement blessé quelques jours plus tôt à Oran. Ginestet lui raconte les horreurs qui se sont produites dans cette ville depuis le début de juillet et le rôle ignoble tenu par le général Katz.
Le général de Larminat supporte très mal ce récit. Il ne peut accepter la présidence d’une cour martiale qui va juger des officiers qui se sont révoltés dans l’unique objectif de défendre la France. Il refuse de participer à cet hallali judiciaire voulu par de Gaulle et se confie à l’un de ses proches, venu lui rendre visite : « Je ne serai pas le Fouqier-Tinville de la Ve République. Je me tuerai ce soir ».
C’est ce qu’il fait. Il a préféré se donner la mort que l’ordonner pour des officiers dont il respecte l’honneur.
De Larminat avait surtout été très marqué psychologiquement par les conditions atroces et inhumaines de la mise à mort du lieutenant Degueldre quelques jours plus tôt.
Il sera aussitôt remplacé par le général Gardet qui ne se pose pas les mêmes états d’âme et participera ainsi à « l’assassinat » du lieutenant Degueldre.
Qui est Roger Degueldre ? Né dans le nord de la France il entre en résistance en 1942, à moins de 20 ans, auprès des partisans communistes FTP (Francs-Tireurs et Partisans) (Cela est important contre ceux qui veulent démontrer que l’OAS n’était composée que de d’extrémistes fascistes). Degueldre s’engage dans la Légion étrangère, se bat en Indochine où il obtient la médaille militaire pour acte de courage, puis c’est l’Algérie.
Refusant de se renier devant le serment fait sur la tombe du colonel Jeanpierre : "Plutôt mourir, mon colonel, que de laisser l'Algérie aux mains du FLN. Je vous le jure !" - Il entre en clandestinité le 11 décembre 1960 et prend le commandement opérationnel des commandos « Delta ».
Degueldre est arrêté le sept avril 1962 et condamné à mort le 28 juin de cette même année, malgré l’engagement de son avocat, Me Tixier-Vignancour qui estime que le général Salan (chef du lieutenant Degueldre) épargné il est impensable que celui-ci soit exécuté.
Degueldre décroche ses nombreuses décorations et les remet à sa femme.
De Gaulle refuse de recevoir Me Tixier-Vignancour. Il accepte cependant d’écouter distraitement l’autre avocat, Me Denise Macaigne, mais ne dit pas un mot ni ne pose aucune question. Pour lui Degueldre est déjà mort.
Nous sommes au fort d’Ivry le six juillet 1962. C’est l’aurore. Il fait une belle journée d’été, presqu’aussi chaude que celles que Degueldre a connu en Algérie. On le réveille. Il revêt sa tenue léopard, enroule autour de son cou le foulard de la Légion et pose sur sa tête le béret vert du 1erRégiment de Parachutistes, dont il porte l’insigne sur sa poitrine.
Degueldre éprouve le besoin de s’exprimer une dernière fois : «Je suis fier de mourir pour tenir le serment qu’a fait tout officier ayant servi en Algérie. J'ai donné ma parole, je la tiens. Dîtes aux Algériens que, si je ne suis pas de leur race, n’étant pas né sur leur sol, je les ai beaucoup aimés et je les aime toujours».
Se tournant ensuite vers l’avocat général Gerthoffer : « Je ne vous garde pas rancune, mais je vous plains ».
Puis vers son défenseur, Me Tixier-Vignancour, : « Dîtes que je suis mort pour la France ».
Attaché au poteau, Degueldre refuse qu’on lui bande les yeux. La mort ne lui fait pas peur, il l’a tellement côtoyé depuis ses vingt ans. Serrant le drapeau tricolore contre sa poitrine et posant sa main sur la poche de sa vareuse où se trouve la photo de son petit garçon, Philippe, qu’il n’a jamais vu, il crie « Vive la France » et entonne d’une voix claire et puissante La Marseillaise.
Devant tant de courage et de patriotisme le peloton d’exécution hésite à tirer puis la salve part et le peloton se retire.
L’adjudant-chef chargé de donner le coup de grâce s’approche mais constate que Degueldre est toujours vivant. Une seule balle, sur les douze, l’a atteint au ventre.
Il ne s’agit plus alors d’achever un moribond mais de tuer de sang-froid un être vivant. Sa main tremble, il tire mais à côté.
Ceux qui assistent à cette scène surréaliste sont stupéfaits.
Devant une telle situation, unique dans les annales, les juristes s’accordent à dire que la sentence ayant été exécutée et que le condamné étant toujours en vie, il faut lui porter les soins nécessaires et c’est à cet instant que cette exécution devient un « assassinat ».
L’avocat général très irrité fait signe au sous-officier de recommencer, cependant que Degueldre, recroquevillé sur lui-même, souffre le martyr.
L’adjudant-chef, dont la main tremble encore davantage, pointe une nouvelle fois son arme vers la tête du supplicié et, fermant les yeux, appuie sur la détente. Pas un bruit, l’arme s’est enrayée. Le lieutenant Degueldre tourne son regard vers le sous-officier ne comprenant pas la situation dramatique dans laquelle il se trouve. Une rumeur monte de l’assistance
L’avocat général ordonne qu’une autre arme soit apportée et comme personne parmi les militaires présents n’en possède une il faut se dépêcher d’aller en chercher.

Degueldre est toujours vivant et c’est là que Me Tixier-Vignancour, pourtant si prompte à saisir la moindre occasion devant un prétoire, reste pétrifié, hypnotisé par la scène à laquelle il assiste, et il s’en souviendra jusqu’à sa mort. Il aurait dû se précipiter, se jeter sur le corps de Degueldre, exiger que l’on arrête ce massacre, mais il ne bouge pas.
Un pistolet est remis à l’adjudant-chef, aussi pâle que le lieutenant, écoeuré par cette boucherie, mais obéissant aux ordres sans avoir le courage de se révolter. Il tire une nouvelle fois mais pas au-dessus de l’oreille, comme le stipule le règlement, mais près de l’omoplate et, enfin, c’est la dernière détonation. Le lieutenant Degueldre a rejoint les siens au paradis des héros.
Le 06 juillet 1962 un officier français a été assassiné sur ordre du général de Gaulle et aujourd’hui, près de 60 ans plus tard, tous ceux qui font référence au gaullisme, tous les héritiers de De Gaulle, ont le sang du lieutenant Degueldre sur leurs mains.
(Extrait du livre « J’accuse De Gaulle » - édition 2016 - par Manuel Gomez. Disponible sur AMAZON.)
A Paris, les différents procès des responsables OAS tournent à la déconfiture du général De Gaulle. Il n’obtient pas la tête des généraux qui ont osé le braver, il devra se contenter du sang des légionnaires Albert Dovecar et Roger Degueldre, fusillés respectivement les 7 juin et 6 juillet 1962, d’un civil, Claude Piegts et de l’ingénieur chef Bastien-Thiry, qui n’avait pas une goutte de sang sur ses mains, dont il refusera les grâces et qu’il fera exécuter sans aucune pitié.
Ce mot n’existait pas dans le vocabulaire de de Gaulle.
Il n’émettra même pas une parole de regret en apprenant le suicide de son ami le général de Larminat, compagnon de la libération et grand chancelier de l’Ordre.
Le général de Larminat devait présider le tribunal de la cour martiale de justice (qui sur ordre de de Gaulle avait remplacé le Haut tribunal militaire jugé trop clément envers les « factieux »). Il s’agit là d’une juridiction d’exception totalement contraire au droit français car elle permet de juger sans aucune voie de recours.
Le général de Larminat se fait hospitaliser au Val de Grâce afin d’échapper, sous le prétexte d’un ennui de santé, à cette présidence qu’on lui impose. Sa chambre est voisine de celle du général Ginestet, qui vient d’être grièvement blessé quelques jours plus tôt à Oran. Ginestet lui raconte les horreurs qui se sont produites dans cette ville depuis le début de juillet et le rôle ignoble tenu par le général Katz.
Le général de Larminat supporte très mal ce récit. Il ne peut accepter la présidence d’une cour martiale qui va juger des officiers qui se sont révoltés dans l’unique objectif de défendre la France. Il refuse de participer à cet hallali judiciaire voulu par de Gaulle et se confie à l’un de ses proches, venu lui rendre visite : « Je ne serai pas le Fouquier-Tinville de la Ve République. Je me tuerai ce soir ».
C’est ce qu’il fait. Il a préféré se donner la mort que l’ordonner pour des officiers dont il respecte l’honneur.
De Larminat avait surtout été très marqué psychologiquement par les conditions atroces et inhumaines de la mise à mort du lieutenant Degueldre quelques jours plus tôt.
Il sera aussitôt remplacé par le général Gardet qui ne se pose pas les mêmes états d’âme et participera ainsi à « l’assassinat » du lieutenant Degueldre.
Qui est Roger Degueldre ? Né dans le nord de la France il entre en résistance en 1942, à moins de 20 ans, auprès des partisans communistes FTP (Francs-Tireurs et Partisans) (Cela est important contre ceux qui veulent démontrer que l’OAS n’était composée que de d’extrémistes fascistes). Degueldre s’engage dans la Légion étrangère, se bat en Indochine où il obtient la médaille militaire pour acte de courage, puis c’est l’Algérie.
Refusant de se renier devant le serment fait sur la tombe du colonel Jeanpierre : "Plutôt mourir, mon colonel, que de laisser l'Algérie aux mains du FLN. Je vous le jure !" - Il entre en clandestinité le 11 décembre 1960 et prend le commandement opérationnel des commandos « Delta ».
Degueldre est arrêté le sept avril 1962 et condamné à mort le 28 juin de cette même année, malgré l’engagement de son avocat, Me Tixier-Vignancour qui estime que le général Salan (chef du lieutenant Degueldre) épargné il est impensable que celui-ci soit exécuté.
Degueldre décroche ses nombreuses décorations et les remet à sa femme.
De Gaulle refuse de recevoir Me Tixier-Vignancour. Il accepte cependant d’écouter distraitement l’autre avocat, Me Denise Macaigne, mais ne dit pas un mot ni ne pose aucune question. Pour lui Degueldre est déjà mort.
Nous sommes au fort d’Ivry le six juillet 1962. C’est l’aurore. Il fait une belle journée d’été, presqu’aussi chaude que celles que Degueldre a connu en Algérie. On le réveille. Il revêt sa tenue léopard, enroule autour de son cou le foulard de la Légion et pose sur sa tête le béret vert du 1erRégiment de Parachutistes, dont il porte l’insigne sur sa poitrine.
Degueldre éprouve le besoin de s’exprimer une dernière fois : «Je suis fier de mourir pour tenir le serment qu’a fait tout officier ayant servi en Algérie. J'ai donné ma parole, je la tiens. Dîtes aux Algériens que, si je ne suis pas de leur race, n’étant pas né sur leur sol, je les ai beaucoup aimés et je les aime toujours».
Se tournant ensuite vers l’avocat général Gerthoffer : « Je ne vous garde pas rancune, mais je vous plains ».
Puis vers son défenseur, Me Tixier-Vignancour, : « Dîtes que je suis mort pour la France ».
Attaché au poteau, Degueldre refuse qu’on lui bande les yeux. La mort ne lui fait pas peur, il l’a tellement côtoyé depuis ses vingt ans. Serrant le drapeau tricolore contre sa poitrine et posant sa main sur la poche de sa vareuse où se trouve la photo de son petit garçon, Philippe, qu’il n’a jamais vu, il crie « Vive la France » et entonne d’une voix claire et puissante La Marseillaise.
Devant tant de courage et de patriotisme le peloton d’exécution hésite à tirer puis la salve part et le peloton se retire.
L’adjudant-chef chargé de donner le coup de grâce s’approche mais constate que Degueldre est toujours vivant. Une seule balle, sur les douze, l’a atteint au ventre.
Il ne s’agit plus alors d’achever un moribond mais de tuer de sang-froid un être vivant. Sa main tremble, il tire mais à côté.
Ceux qui assistent à cette scène surréaliste sont stupéfaits.
Devant une telle situation, unique dans les annales, les juristes s’accordent à dire que la sentence ayant été exécutée et que le condamné étant toujours en vie, il faut lui porter les soins nécessaires et c’est à cet instant que cette exécution devient un « assassinat ».
L’avocat général très irrité fait signe au sous-officier de recommencer, cependant que Degueldre, recroquevillé sur lui-même, souffre le martyr.
L’adjudant-chef, dont la main tremble encore davantage, pointe une nouvelle fois son arme vers la tête du supplicié et, fermant les yeux, appuie sur la détente. Pas un bruit, l’arme s’est enrayée. Le lieutenant Degueldre tourne son regard vers le sous-officier ne comprenant pas la situation dramatique dans laquelle il se trouve. Une rumeur monte de l’assistance
L’avocat général ordonne qu’une autre arme soit apportée et comme personne parmi les militaires présents n’en possède une il faut se dépêcher d’aller en chercher.
Degueldre est toujours vivant et c’est là que Me Tixier-Vignancour, pourtant si prompte à saisir la moindre occasion devant un prétoire, reste pétrifié, hypnotisé par la scène à laquelle il assiste, et il s’en souviendra jusqu’à sa mort. Il aurait dû se précipiter, se jeter sur le corps de Degueldre, exiger que l’on arrête ce massacre, mais il ne bouge pas.
Un pistolet est remis à l’adjudant-chef, aussi pâle que le lieutenant, écoeuré par cette boucherie, mais obéissant aux ordres sans avoir le courage de se révolter. Il tire une nouvelle fois mais pas au-dessus de l’oreille, comme le stipule le règlement, mais près de l’omoplate et, enfin, c’est la dernière détonation. Le lieutenant Degueldre a rejoint les siens au paradis des héros.
Le 06 juillet 1962 un officier français a été assassiné sur ordre du général de Gaulle et aujourd’hui, près de 60 ans plus tard, tous ceux qui font référence au gaullisme, tous les héritiers de De Gaulle, ont le sang du lieutenant Degueldre sur leurs mains.
(Extrait du livre « J’accuse De Gaulle » - édition 2016 - par Manuel Gomez. Disponible sur AMAZON.)