26 mars 1962, rue d’Isly, à Alger : DE GAULLE ORDONNE A L’ARMEE DE TIRER SUR DES FRANÇAIS.
C’est ce qu’affirme celui qui était son ministre de l’Intérieur en mai 1968, Christian FOUCHET qui, rappelons-le, avait été Haut-commissaire en Algérie ce 26 mars 1962 :
Limogé par le chef de l’Etat, De Gaulle, le 31 mai 1968, voici son témoignage, et son aveu, en date du 28 octobre 1969 :
«J’en ai voulu au général de m’avoir limogé au lendemain de mai 1968. C’était une faute politique. De GAULLE m’a reproché de ne pas avoir maintenu l’ordre en mai 68.
- "Vous n’avez pas osé tirer" m’a-t-il dit.
- J’aurais osé s’il l’avait fallut – lui ai-je répondu - Souvenez-vous de l’Algérie et de la rue d’Isly. Là j’ai osé et je ne le regrette pas parce qu’il fallait montrer que l’armée n’était pas complice de la population algéroise.
(Source : Jean Mauriac « L’Après De Gaulle – notes confidentielles 1969/1989 – page 41)
Ce même mois de mai 1968, De Gaulle lançait à Pompidou une phrase qui résumait toute sa carrière : « Mais, Pompidou, figurez-vous que j’ai passé ma vie à tirer contre des Français ». (Rapporté par Edouard Balladur à Daniel Rondeau, auteur de « Vingt-ans et plus – journal 1991/2012)
De Gaulle voulait absolument rejeter toute la responsabilité du non-respect des «Accords d’Evian» sur l’action de l’OAS et pour cela il a recouru à la force des armes et fait ouvrir le feu sur une population désarmée qui ne souhaitait que rester française.
Le 26 mars 1962, une manifestation pacifique partait du plateau des Glières pour se diriger par la rue d’Isly vers le quartier de Bab-el-Oued, qui subissait un « blocus » depuis plus d’une semaine, avec tanks dans les rues, rafales de mitraillettes dirigées vers les balcons et mitraillages des terrasses par les avions.
Bien entendu personne n’était armée, cela était absolument impossible compte tenu de l’état de siège dans lequel se trouvait Alger.
Arrêté par les militaires à hauteur du Lycée Bugeaud, le rassemblement revenait vers la Grande Poste lorsque, à hauteur du boulevard Laferrière, une rafale partait d’un fusil mitrailleur mis en batterie au dernier étage du 64 de la rue d’Isly.
Les tirailleurs algériens d’un régiment français, mis en place volontairement à cet endroit stratégique par le haut commandement militaire, complètement affolés tiraient sur tout ce qui bougeait : vers les toits, sur la foule, ce fut une tuerie. Des tirs sans sommation qui ont duré près de douze minutes, malgré les cris de « Halte au feu ! » d’un officier français.
Le bilan officiel sera de 46 morts et 200 blessés parmi les manifestants innocents et d’un seul mort pour les tirailleurs (abattu par un officier alors qu’il achevait, avec son arme, une femme à terre, blessée).
Un second rapport militaire fera état d’une centaine de morts et de plus de 200 blessés.
A la morgue de l’hôpital de Mustapha j’ai vu ces corps nus, jetés sur le sol. C’était affreux. Ils ne seront pas rendus à leur famille.
La vérité « officielle » sur ce massacre programmé n’a toujours pas été reconnue par les différents gouvernements français et il serait étonnant qu’elle le soit un jour.
Une certitude, ce massacre de la rue d’Isly et, par conséquent l’objectif de cette manœuvre, était d’obtenir la fracture totale entre les Français d’Algérie et l’armée métropolitaine, promise dorénavant au service de l’ALN.
De Gaulle avait atteint son but.
Dès le cessez le feu, proclamé le 19 mars 1962, l’armée française, sur les ordres de De Gaulle et de quelques officiers supérieurs, les généraux Katz, Debrosse et Ailleret, a perdu son honneur car elle n’a pas éprouvé le moindre état d’âme quand il a fallu tirer sur des français qui défendaient une terre française à Alger et ne s’est pas opposée au massacre, par le FLN, de près de 3000 français à Oran.
Honneur aux officiers de notre armée qui ne se sont pas parjurés.
Le général de Pouilly, un fidèle parmi les fidèles à De Gaulle, n’hésitera pas à écrire : « J’ai choisi la discipline mais choisissant la discipline, j’ai également choisi avec mes concitoyens et la Nation Française la honte d’un abandon et, pour ceux qui n’ayant pas supporté cette honte et se sont révoltés contre elle, l’Histoire dira peut-être que leur crime est moins grand que le nôtre. »
J’aimerais pouvoir en dire davantage car il y a tant à dire mais, comme Joseph Kessel, dans sa préface de « L’Armée des ombres », ma conclusion sera « Je voulais tant dire et j’ai dit si peu » !